Projet B2V : les Bois de Vigne au service de la Vigne
Les sarments de vigne sont une matière biosourcée riche mais peu valorisée. Laurent Kamel et les partenaires du projet recherchent des débouchés en nutrition, cosmétique et biocontrole.Laurent KAMEL, chef de projet R&D spécialisé en Biotechnologies nous présente le projet le projet sur lequel il travaille : B2V
Comment a été imaginé le projet B2V (bois de vigne au service de la vigne)?
Tout d’abord nous sommes partis du constat que chaque année, le cycle de la vigne conduit à la génération de volumes importants de sarments et bois de vigne au cours de la saison de la taille (entre 1 à 2 tonnes /ha). Ces bois sont actuellement peu valorisés, principalement broyés et laissés au sol comme léger apport de matière organique. Or, des analyses ont montré que cette ressource regorgeait de molécules antioxydantes qui peuvent trouver différents débouchés en nutrition humaine et animale, cosmétique, mais aussi en biocontrôle.
Quels en sont les objectifs ?
Ce projet a pour objectif :
- De développer un produit anti-mildiou naturel et efficace comme alternative à l’emploi de certains produits phytosanitaires, ainsi qu’un complément alimentaire destiné à la nutrition humaine.
- De démontrer la faisabilité technico-économique de créer une bioraffinerie des sarments de vigne au sein des bassins de production de la coopérative.
Pour ce faire, l’ensemble du processus de raffinerie sera étudié, de la collecte des sarments jusqu’à la formulation des différents produits en passant par l’extraction des molécules. Sur ce dernier point, il sera également évalué la capacité des résidus de sarments à générer des amendements organiques, ainsi qu’à servir de support de culture pour la multiplication de microorganismes d’intérêt agronomiques.
Quel est le rôle des différents partenaires ?
La société INOSUD, filiale du groupe GRAP’SUD intervient dans les procédés d’extraction et de purification des molécules afin de développer un complément alimentaire. Elle travaille en partenariat avec le centre de ressources technologique CATAR qui intervient également dans la caractérisation de la matière première. De son côté, la société M2I BIOCONTROL est en charge de concevoir et formuler un produit de biocontrôle efficace contre le mildiou de la vigne et collabore avec l’Institut Français de la Vigne et du Vin (IFV) pour valider l’action des formulations en laboratoire, puis sur parcelle pour démontrer l’efficacité du produit.
Sur quelles parties du projet B2V interviens-tu ?
J’interviens à la fois en amont de la phase d’extraction en collectant pour le CRT-CATAR les sarments chez les vignerons de la coopérative pour étude des teneurs en stilbènes selon différents paramètres culturaux et environnementaux (cépages, terroirs, âge de la vigne…) mais également en aval afin de valoriser les résidus de sarments pour générer des amendements organiques.
Sur ce dernier point, des expérimentations sont actuellement menées dans notre laboratoire de biotechnologie de Rabastens (création en 2019 avec l’aide de la Région Occitanie) afin d’identifier des microorganismes (bactéries, champignons) indigènes d’intérêt agronomique pour la vigne issus de nos parcelles. Ces microorganismes seront ensuite multipliés pour incorporation dans un amendement organique. L’application de ces amendements complexes sur nos parcelles de vigne devrait ainsi permettre de restaurer certains services écologiques rendus par le sol (meilleure structuration physique, participation à la protection végétale et sa nutrition par recyclage de la matière organique, stockage du carbone…) longtemps impactés par certaines pratiques agriculturales contraignantes.
Quels sont les premiers résultats ?
En lien avec le CRT-CATAR nous avons tout d’abord identifié et évalué les paramètres clés qui influeraient sur les teneurs en molécules d’intérêt : cépage, effet millésime, date de récolte. Nous avons également mené des études de suivi de l’évolution de ces teneurs au cours de la période de séchage qui ont permis d’identifier la période idéale de prise en charge des sarments et les conditions d’entreposage requises.
Ensuite, concernant la valorisation des sarments résiduels après extraction, nous avons développé des protocoles de production de microorganismes modèles en bioréacteur agité. Nous avons ainsi pu obtenir des microorganismes en quantité satisfaisante, dont des microorganismes indigènes issus de nos parcelles. A ce jour, une dizaine d’espèces ont été clairement identifiés et possèderaient des propriétés agronomiques intéressantes (action biofertilisante, biostimulante et/ou de biocontrôle).
Enfin, des essais de compostage avec des sous-produits issus de la vigne (marc, sarments résiduels) et d’autres déchets végétaux en mélange (fruits et légumes, déchets bois verts criblés) sont actuellement en cours et devraient permettre d’identifier la recette la plus riche en élément fertilisants et en humus stable. La modalité sélectionnée pourra également être enrichis en microorganismes d’intérêts avec pour objectif d’améliorer la qualité biologique du sol ainsi que la santé et la nutrition de la vigne.
Initié en 2019 pour une durée de 3 ans, le projet B2V a été labellisé par le pôle Agri Sud-Ouest Innovation et est soutenu financièrement par la Région Occitanie et les Fonds européens (FEDER). Vinovalie R&D est en charge de la coordination du projet et s’est entourée des partenaires suivants : le Centre de Ressources Technologique CATAR, l’Institut Français de la Vigne et du vin (IFV), et les sociétés INOSUD et M2I BIOCONTROL.